Les Experts Bikepacking : les conseils de Yann Gobert

De Rookie à Rookie

Y a-t-il de mauvaises surprises que tu as pu vivre et dont tu voudrais nous éviter l’expérience ?

(Rires) La bonne nouvelle pour votre trip en Norvège, c’est que ce n’est pas une course ! Vous avez un temps limité et des étapes prévues, mais ça va. C’est quand tu conçois ton trajet qu’il faut faire attention à ne pas prévoir trop de kilomètres. Surtout les premiers jours ! Il te faut un temps d’adaptation : tu vas t’arrêter souvent pour des tonnes de raisons, tu vas perdre du temps au début et ensuite une routine va s’installer, tu vas rouler plus longtemps et avaler plus de kilomètres.

Ah ! On pensait justement faire les grosses étapes au début, puisqu’on serait en forme. Mauvaise idée ?

Le risque est de ne pas arriver à ton étape du premier jour et de déjà te sentir en retard… Alors que si tu te dis “on ne fait que 80km en 10h”, tu as le temps pour faire tout ce que tu veux, et si tu arrives en avance tu vas rouler deux heures de plus et dans ta tête ce sera du bonus !

Il est important de vraiment se donner du temps en fait ! Si tu prévois trop de choses et que tu n’as pas le temps de les faire, tu reviens frustré. Il vaut mieux faire moins de kilomètres sur le papier et aviser une fois sur place. C’est tellement un paysage différent, surtout les Fjords. Vous allez voir, c’est complètement dingue. Tu as l’impression d’être dans un décor de cinéma, les lumières sont folles, les gens sont différents, beaucoup plus détentes donc c’est dommage de se dire “merde on est à la bourre, faut se magner on n’a pas le temps de s’arrêter”. Bref, prenez le temps !

Qu’emporterais-tu dans tes sacoches pour une aventure comme No(r)way ?

Pour sept jours ? Prenez deux cuissards. Un ou deux jersey ou t-shirt.
Ce qui est important c’est d’avoir chaud le soir. Donc la micro-doudoune est indispensable ! Tu peux aussi prendre un pantalon ultra-léger qui te coupe du vent et qui peut te servir s’il y a de la pluie. Évidemment une veste imperméable mais plus en mode alpinisme pour pouvoir mettre la capuche sur le casque. Des bons gants. Pas forcément des gants énormes, mais de quoi te protéger du vent et de la pluie.

Le gros conseil c’est de tester tout son matériel avant de partir et de se demander à chaque fois si tu vas réellement te servir de ce que t’emportes. 100g ça peut paraître ridicule mais 100g + 100g + 100g + la bouffe que tu vas prendre sur la route + l’eau… ça va vite te faire 3-4kg, et tu vas les sentir !

Et sinon… une bonne crème pour le cul ! (rires)
Tu passes des heures et des heures de suite sur la selle donc tu peux vite avoir des irritations. Sur l’AMR je me disais souvent que je pouvais attendre avant de mettre de la crème. Mais en fait c’est une erreur : il ne faut pas attendre d’avoir mal. Il faut en mettre tout de suite pour être sûr de ne pas avoir de problème.

Aurais-tu des astuces contre le froid ?

Personnellement, j’aime bien les vestes sans manches qui te couvre juste la poitrine et que tu peux mettre sous ta veste et au-dessus du jersey. Ça te laisse respirer et ça te garde quand même au chaud.

Sinon, le truc qui peut paraître horrible, c’est l’espèce de calotte Gore-Tex que tu mets sous ton casque… En fait c’est super bien ! Ca t’empêche d’avoir froid au front et au crâne, ce qui n’est pas négligeable quand on sait qu’on perd de la chaleur par les extrémités.

Enfin, une chose importante pour le froid mais aussi pour le confort c’est la chaussure. J’ai un modèle de chez Mavic qui est top et qui est bien pensé pour toutes les conditions. Il ne faut surtout pas négliger les chaussures car beaucoup de problèmes peuvent venir par les pieds (froid, blessures, etc).

Aurais-tu des astuces pour nous préparer physiquement ?

Au-delà du défi physique, il faut bien regarder et étudier la carte. Savoir par où on va passer, quels seront les moments où ça va être compliqué, quelles sont les heures où le soleil se couche et se lève… En gros c’est visualiser son trajet. Il faut aussi savoir à quelles heures ouvrent et ferment les boutiques, connaître les jours fériés pour éviter de se retrouver comme un con. Tu te sentiras plus préparé, et donc rassuré.

Après sur l’aspect physique c’est toujours mieux d’être un peu entraîné parce que si tu commences ton trip par des crampes tu vas douter (rires). Tu vas te sentir mauvais, avoir l’impression d’être un boulet pour ton pote, de ne pas pouvoir aller jusqu’au bout. Donc oui, une bonne forme physique, sans avoir besoin d’être un athlète !

Est-ce que tu te considères ou t’es-tu déjà considéré comme un Rookies ?

Bien évidemment ! Encore récemment sur le Gravelman j’ai appris des trucs pour mieux gérer mes futures courses. Je suis toujours Rookie et tant mieux ! Si tu sais tout sur tout, c’est un peu chiant quand même (rires). On est toujours le Rookie de quelqu’un ! Moi je me sens le Rookie d’un Sofiane Sehili par exemple ! Je trouve ça agréable d’être Rookie.

Et ce qui est cool dans les sports outdoors, c’est que tu ne peux pas tout maîtriser. Il y a la météo, le chemin, etc. Ce sont des impondérables qui sont sympas et qui font que tu apprends toujours.

Quel est LE conseil que tu aurais aimé recevoir plus tôt à vélo ?

Passe en tubeless bordel !
Ça te change la vie. Tubeless forever. Quand tu es en tout-terrain, tu gagnes en confort mais surtout tu ne te fais pas chier à changer ou réparer une chambre-à-air. Je déteste crever, ça me gonfle au plus haut point, mais là ça se répare tout seul ! Sur l’AMR, 1200km dans de la caillasse de merde, des branches pointues et no problem. À un moment donné, j’entend un petit bruit d’air, je sens du préventif sur le mollet, alors je m’arrête pour mettre le doigt dessus et puis plus rien. Je n’ai jamais plus eu de crevaison.

Quel est LE conseil que tu aurais aimé recevoir plus tôt en bikepacking ?

J’ai un peu appris tout seul car j’ai commencé tôt et il n’y avait pas trop de matériels adaptés à l’époque. Mais je pense que le conseil ultime c’est de partir léger ou du moins faire la bonne balance entre confort et non-essentiel. Par exemple, ma femme quand on est parti en bikepacking ensemble, c’est ça qu’elle a adoré : le fait de n’avoir besoin de rien ou de quasiment rien.

Un petit mot pour conclure ?

Profitez putain ! C’est trop cool. Pas de pression, ce n’est pas une course. Il y a beaucoup de gens qui ne prennent pas le temps ou qui n’osent pas voyager à vélo car ils se comparent aux autres. Chacun fait à sa façon et il n’y a pas une seule et unique manière de faire du vélo, de voyager à vélo. Ce qui est intéressant c’est d’apprendre par soi-même. De découvrir et de se découvrir. La liberté !

Véritable "Outdoor Enthusiast" comme ils disent si bien. 📷Photographe et passionné de micro-aventure, je découvre avec bonheur sur le tard le bikepacking et le monde du Gravel. 🚴🏻‍♂️

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