Un Rookie sur le Bikingman Portugal 2021

Faro, Portugal, 3 octobre 2021

J’y suis enfin. Enfin presque. Le départ est demain, mais cette fois-ci je ne vois ce qui pourrait empêcher ma participation à mon 1er Bikingman. Il y a un an, j’étais en Corse pour cette même épreuve, puis le gouvernement annonçait un couvre-feu soudain, qui changeait le format de la course, perdant de son intérêt à mes yeux.

Car pour moi, le Bikingman c’est repousser ses limites : beaucoup roulé, peu d’arrêts, peu de sommeil. Une course contre soi-même, une lutte contre son confort, une bataille mentale plus que physique. 1000kms avec 12 000 mètres de dénivelé positif, dans l’Algarve, au Sud du Portugal. Pas de la tarte non plus. J’ai maintenant 1 mois et demi d’entrainement ( ce n’est pas grand-chose ), j’ai pas mal couru, un peu roulé mais ce qui est sûr c’est que je me vois finisher. Mais en combien de temps ? Si je n’ai pas de gênes, pas de blessures, pas d’accidents, je vise les 20km/h de moyenne, sans les pauses. Je veux dormir le moins possible, c’est le plan mais en 1000km il peut s’en passer des choses…

Laventure a commencé bien avant aujourd’hui. Au-delà de l’entraînement, il y a la préparation logistique : matériels, nutrition, stratégie. En bon Rookie, j’ai un peu tout fait au dernier moment. J’ai eu la chance d’avoir un ami qui m’a installé des prolongateurs la veille du départ en avion. Je n’ai pas roulé avec. On verra bien…

En bon Rookie, j’ai un peu tout fait au dernier moment.

Pour la nutrition je repars sur les bases de mon Annecy-Barcelone : des pastilles, des gels, des barres. S’alimenter et boire régulièrement est pour moi une des clefs du succès.

Pour la stratégie, je veux dormir le moins possible, et quand il faudra le faire, j’aimerai faire des micro siestes sur le bord de la route, la journée, quand il fait bon. Ce sera la grande inconnue de la course…

J’ai peaufiné mon équipement et en allant au Décathlon local, j’ai pu gouter à mon premier verglas d’été. Verdict : un genou et un coude amochés, une veste gore tex toute neuve déchirée, mais le vélo est intact et c’est presque le principal. La prudence sera de mise. Dans 40 minutes c’est le briefing puis je préparerai le vélo dans sa version finale pour partir le lendemain.

Faro, Portugal, 7 octobre 2021


Je l’ai fait. Je suis finisher. En 86 heures et 11 minutes. Tout ce que j’ai redouté a eu lieu, sauf la gamelle. Raconter ces 4 jours, ce que j’ai vécu et ressenti, pourrait être intéressant, ça pourrait être aussi très ennuyant tellement il me semble compliqué de retranscrire au plus juste ce par quoi je suis passé, physiquement, mentalement et émotionnellement. Je voulais vous proposer autre chose, un truc plus pratique, pour qu’un jour vous aussi vous alliez chercher un peu d’aventures, un peu de folie, sur un vélo, peu importe où. J’ai décidé de raconter mes erreurs, elles sont nombreuses, afin que vous ne les fassiez pas à votre tour. Elles peuvent paraitre stupides, énormes ou minimes, c’est peut-être du déjà vu, mais ce sont les miennes, celles d’un rookie.

  • Ne sous estimez pas les éléments

Dame nature, même dans une région douce, sans « montagnes », avec une météo stable, vous réservera toujours des surprises. Celle de ce bikingman fut le vent, de face pendant les 300 premiers kilomètres, puis de côté pour des centaines d’autres. Résultat : on avance moins vite, on crame de l’énergie, mentalement ça nous attaque, et nos plans s’en retrouvent tout chamboulés : on doit s’arrêter plus souvent, on doit manger plus, on arrive au checkpoint en pleine nuit, crevé.

Il y eu aussi le froid qui a surpris tout ceux qui voulaient dormir la nuit à l’arrache, j’en faisais partie. J’ai « dormi » 1h sur un matelas fourni par la course, avec ma couverture de survie, qui était loin d’être suffisante. À 3h30 du matin je repartais car j’étais frigorifié. J’ai roulé, mais lentement car je n’avais pas pris de jambières et mes jambes, tendons compris, n’étaient pas chauds du tout à pousser fort. Résultat : cramé dès le 1er jour!

  • Le confort est plus important que le poids du vélo

Pourquoi ? Car les 500 grammes que j’ai économisé en ne prenant pas de jambières ni de sac de couchage, m’ont plombé physiquement : j’ai mal et peu dormi. J’ai dû rouler les jambes froides et ça s’est répercuté sur mes tendons et genoux. Ça a aussi changé mon plan initial de dormir dehors et je me suis rabattu sur des hôtels.

Alors bien sûr il ne faut pas se charger inutilement : je n’avais pas d’affaires de rechange par exemple et ça ne m’a pas gêné. Mais quand on veut juste finir, quand on ne sait pas dans quoi on s’embarque, mieux vaut jouer la sécurité !

  • Mal calculer l’effort à fournir

Je n’avais que quelques exemples d’efforts longs que j’avais fait en vélo. Alors j’ai fait de savants calculs qui n’avaient finalement rien de juste. Bien sûr la distance et le dénivelé sont des indicateurs importants, mais la topographie, l’accumulation des efforts, la chaleur, le vent sont autant de variables à prendre en compte. Je roule dans les Alpes, je monte longtemps PUIS je descends longtemps. Ce n’était pas du tout le cas ici. Une succession de bosses sur 300 kms m’a complètement surpris. Je n’avais jamais connu ce genre de parcours !

Suite à ce Bikingman, j’ai cherché à savoir s’il y avait un équivalent à la notion de Km-effort utilisé en randonnée pédestre. Je n’ai rien trouvé. Il serait intéressant, avec un peu plus d’expérience, de savoir quantifier ces efforts.

  • Préparer son popotin

C’était ce que je redoutais le plus, avec les tendinites. Au bout de 300kms j’avais les 1ères douleurs. J’aurais dû me tartiner plus avec de la crème de qualité. Aussi, ne pas négliger sa selle. Si on a le temps et le budget, en essayer plusieurs pour trouver la bonne. Sans cette gêne, j’aurais roulé plus et plus vite. Une fois qu’on a mal au cul, on ne pense qu’à ça. Ça gâche un peu le plaisir.

En parlant avec des vétérans du circuit, on m’a parlé de la crème Nok, et on m’a dit de m’en mettre même avant la course, pendant une semaine, pour préparer la peau. J’ai vérifié, ce n’est pas un piège à Rookie, c’est une info valable.

Annecy, France, 21 octobre 2021

Voilà, je dirais que ce sont mes plus grandes erreurs sur ce bikingman. Je n’ai pas mis le manque d’entrainements car dans mon cas ce n’était pas un choix mais une contrainte. J’aurai aimé mieux préparer mon corps à cette épreuve pour moins en baver sur le coup et surtout après. Mes genoux viennent à peine de s’en remettre, mes tendons d’Achille me tirent encore un peu. J’ai fait mon premier run post-bikingman, et ça à l’air d’aller. Mais je ne négligerai pas l’ampleur d’une épreuve de ce type car le vélo ne ment pas, il faut rouler, encore et encore.

Deux semaines après, en repensant à ce que j’ai vécu, je me dis que c’était fou. Fou de partir comme ça sur mon vélo, pour une première en bikepacking, pour 1000 kms. Mais je ne regrette pas un seul instant. La douleur n’est finalement que temporaire quand on franchit la ligne d’arrivée. On est heureux, car pendant 4 jours on a juste eu à penser à manger, dormir et rouler. C’est tout et ça fait du bien. J’ai aussi découvert une belle communauté de passionnés avec qui j’ai partagé de chouettes moments avant, pendant et après les courses. J’ai ressenti des émotions fortes à des moments complètement inattendus, que seul le sport nous procure… Alors n’ayez pas peur, lancez-vous, et tâchez de compiler d’autres erreurs pour éviter de les reproduire !

Le plus dur reste le 1er coup de pédale !


Retrouvez les aventures de Drieu Saint Julien sur son Instagram, entre running
et vélo il y aura de quoi vous essoufler…

BikingMan®️
BikingMan®️
BikingMan®️

Véritable "Outdoor Enthusiast" comme ils disent si bien. 📷Photographe et passionné de micro-aventure, je découvre avec bonheur sur le tard le bikepacking et le monde du Gravel. 🚴🏻‍♂️

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *